- Alpes du Sud -
Notre série d’été continue à propos des 80 ans du débarquement en Provence le 15 août 1944, soit près de deux mois et demi après celui de Normandie. Entre ces deux débarquements, et même avant, les mouvements de résistance des Alpes du Sud se sont mobilisés pour contrer les plans de l’occupant nazi ou pour empêcher en 1944 la convergence des troupes vers les lieux de combat. Cette résistance était menée depuis les maquis mais pas que. D’autres ont profité de leur métier pour contribuer à la résistance contre l’occupant. C’est le cas de Marcel Reymond, cheminot décédé en 1999. Soixante ans plus tôt en 1939, il était dans le cinquième régiment de génie, spécialisé dans la création et la destruction de voie ferrée. Après avoir fait sauter quelques rails pour freiner l’invasion allemande, il regagne son poste de cheminot dès juillet 1940 raconte Guy Reymond, son fils.
« Il faisait la ligne qui faisait de Veynes à Marseille en passant par Sisteron et Pertuis mais aussi la bifurcation à Château-Arnoux pour Digne » G. Reymond
Sur le réseau ferroviaire, Marcel connaît tous ses collègues. Sans forcément s’en rendre compte, il intègre une armée de l’ombre et mène toute une série de petites actions en silence au travail, sans jamais prendre les armes, sans jamais rejoindre le maquis.
« À côté du combattant, il y avait aussi la téléphoniste qui donnait des renseignements. Elle n’était pas résistante mais elle les aidait. Mon père, c’était la même chose » G. Reymond
La Résistance sur le rail
Au quotidien, Marcel, encarté à la SFIO depuis 1936, va vivre avec les Résistants sans faire de vague. Enfin presque : il transporte quelques fois entre deux gares des journaux clandestins dans le wagon à charbon. Parfois, c’est au risque de sa vie. Il était prévenu par les Résistants que tel kilomètre était saboté. Avant le point fatidique, le cheminot faisait ralentir le train et sautait de la locomotive.
« Quelques fois, on ne lui disait rien et il était surpris. Il tombait en même temps que la locomotive sur le ballast » G. Reymond
Parmi les autres actions menées il y a aussi le mauvais aiguillage des wagons qui revenaient dans leurs gares d’origine.
« Les Allemands venaient à la gare et demandaient qui avait fait le train. Après un coup d’œil au cahier de pointage, il était convoqué. Il disait « moi je fais mon train, c’est tout, je ne sais pas ». Mais quelques fois, il avait peur. » G. Reymond
Son épouse, devenue mère en 1943, avait aussi peur. Mais cela n’empêchait pas Marcel d’écouter en cachette la BBC. Le 5 juin 1944, le cheminot entend un message qui lui alerte le débarquement. La radio émet « La pistache est verte ». Une phrase qui a accompagné Guy, son fils, toute sa vie puisqu’il est né deux ans jour pour jour après le débarquement des Alliés en Normandie.