Un Plan Pluriannuel d'Investissements (PPI) à hauteur de 120 millions d'euros jusqu'en 2020 est fixé, car si les Hautes-Alpes est un navire qui ne doit pas tanguer, il faut lui "fixer le cap des priorités d'actions pour les trois ans à venir", souligne Patrick Ricou. Un PPI qui comprend 53 millions d'euros pour sécuriser les 2.000 kms d'infrastructures routières, "le budget minimum pour ne pas creuser un passif pour l'avenir". 17,5 millions d'euros seront débloqués pour l'éducation, la culture, la jeunesse et les sports, avec notamment l'aménagement de trois collèges : Centre à Gap, Serres et Laragne-Montéglin. Un vaste chantier qui ne sera pas abouti cette année, "mais il faut anticiper tout comme il faut accompagner les collectivités locales sur les équipements sportifs et culturels". Afin de garantir le déploiement du Très Haut Débit et résorber les zones blanches, 5,7 millions d'euros seront mis sur la table de l'aménagement numérique. Ce sera 36,3 millions d'euros consacré au développement local, une enveloppe de solidarité directe aux collectivités locales. Enfin, 7,5 millions d'euros iront au patrimoine et aux services publics.
Emprunt et dette
Le remboursement de l'emprunt pour 2018 s'élèvera à 20,1 millions d'euros. Un emprunt "stabilisé" avance la majorité départementale. Au 31 décembre dernier, la dette s'élevait à 184,5 millions d'euros. Au 31 décembre prochain, elle sera de 191,8 millions d'euros, "soit 6,9 années de remboursement".
Un Département qui poursuivra également ses économies de gestion à hauteur de 3,5 millions d'euros pour 2018 par rapport à l'an dernier, soit une diminution de 2,2 %, "nous ne pourrons aller au delà, nous sommes arrivés aux limites de l'exercice", explique Patrick Ricou.
"On ne peut pas nous reprocher d'avoir gaspillé l'argent", P. Ricou
La capacité d'autofinancement sera de 27,9 millions d'euros contre 14 millions d'euros en 2017, mais inquiète toutefois le Département, "sans les mesures correctives de l'an dernier, nous aurions fini l'année dans le rouge", avance le Président. Une capacité qu'il faut maintenir, "pas d'autres choix que d'augmenter le taux du foncier bâti, qui n'a pas été changé depuis 10 ans, et le porter à 26,10 %" contre 20,90 % en 2017.
Le foncier bâti en hausse : + 11,6 millions d'euros dans les caisses
Le Département est face aujourd'hui à deux contraintes. La première est de répondre au Pacte de Mandature signé en juin prochain avec l'État et qui fixe deux engagements, à savoir maintenir le ratio de désendettement sous la barre des 10 ans et ne pas faire évoluer les dépenses de fonctionnement à plus de 1,2 %. Un plafond qu'il sera "compliqué" de tenir "car il ne prend pas compte des évolutions des obligations législatives, l'accueil des Mineurs Non Accompagnés ou encore l'évolution des cotisations patronales". Autant d'éléments qui pèsent dans le budget.
La deuxième contrainte est de maintenir des finances saines et un niveau d'investissement. Le Conseil Départemental prend donc aujourd'hui la décision d'augmenter la taxe sur le foncier bâti.
Hausse des impôts : promesse bafouée pour l'opposition, nécessité financière pour la majorité
Alors qu'en 2015, l'opposition départementale menée par Gérard Fromm soutenait la candidature à la présidence de Jean-Marie Bernard, elle se sent aujourd'hui bafouée. "Les critères n'ont pas été respectés" rappelle l'élu briançonnais. Trois promesses faites en effet par la majorité de droite, à savoir "le maintien de l'équité des territoires, la défense de la ruralité et pas d'augmentation d'impôts".
"Comme le galérien rame, le Haut-Alpin paye", G. Fromm
La promesse n'y est plus aujourd'hui pour Gérard Fromm qui se dit "surpris et déçu par ce budget. Nous avions un an pour trouver des solutions alternatives, mais le contribuable sera la variable d'ajustement". Des solutions alternatives comme vendre du foncier départemental ou rendre la compétence solidarité à l'État. Un débat qui n'est plus d'actualité pour la majorité de Jean-Marie Bernard, "ce n'est pas un marché de dupe, c'est un marché de con". Avant d'être rejoint dans les arguments par l'élu indépendant Rémy Oddou, "le Département devrait compenser financièrement ce transfert alors que l'État, en parallèle, durcira les conditions d'attributions des allocations et reverra les montants". Même son de cloche pour Gérard Tenoux, "le RSA coûte aujourd'hui environ 100 euros par Haut-Alpin contre 130 euros dans les Alpes de Haute-Provence et 200 euros dans les Bouches-du-Rhône. Si le RSA était nationalisé, je peux vous assurer que cela ira largement au-delà des 200 euros".
Passe d'arme entre G. Fromm et A. Murgia sur fond de subventions
Des arguments qui peinent à rassurer dans son vote Gérard Fromm, ce dernier rappelle ainsi qu'en 2009, 30 % d'augmentation "sur les quatre taxes" avaient été décidés. Une contribution "lourde mais surtout pérenne pour les concitoyens. Car ce n'a pas été du one shot mais du shot permanent". Une hausse des impôts alors que les aides sociales ne se maintiennent pas selon lui, "baisse dans l'aide financière aux familles, l'hébergement des jeunes majeurs, les foyers de jeunes travailleurs, les associations de protection à l'enfance, les bourses scolaires. Ce ne sont pas toujours de grosses sommes, mais cela dessine une politique de régression sociale".
Réponse attendue, comme chaque plénière, du côté d'Arnaud Murgia. Selon l'élu, la hausse de 5 points des impôts "représentera pour Briançon 940.000 euros. La ville bénéficie d'1,13 millions d'euros en parallèle d'autorisations de programme", pointe le conseiller. "Si nous adoptions un budget qui ne nous permet pas d'investir, il faudrait donc revenir sur ces autorisations" avant de juger les propos du maire de la ville fortifiée comme "autant de mauvaise foi, de celui qui vote contre le budget à Gap mais coupe les rubans à Briançon".
Le budget 2018 sera donc voté à 21 voix pour, six voix contre de Gérard Fromm, Aurélie Poyau, Joël Bonnafoux, Valérie Rossi et Pascale Boyer, et trois abstentions de Rémy Oddou, Florent Armand et Guy Blanc.
Quid de la solidarité régionale ?
Si les élus tapaient ce mardi matin sur l'État, ils n'étaient pas non plus avares de critiques envers la Région Provence-Alpes Côte d'Azur "qui nous dépouille, nous méprise et nous pénalise" selon Gérard Fromm. Une instance marseillaise qui selon lui ne répond plus présente aux structures d'insertion par l'activité, et encore moins aux besoins de désenclavement du territoire par le ferroviaire. "Remplacer des trains par des bus, je croyais que nous étions en plein développement durable ?" lance t-il ironiquement avant de rappeler le coût du transfert des transports scolaires à la Région pour le département. "Elle a fait une économie de 700.000 euros, où sont-ils ?". Une instance qui "laisse au bord de la route" pour Rémy Oddou. Quant à Pascale Boyer, elle demande un positionnement ferme du Département face à Renaud Muselier.