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Puy Saint-Vincent : la classe privée payée par la mairie fait sa première rentrée

La commune paye sa propre enseignante de maternelle, après la suppression du poste dans la nouvelle carte scolaire. Cas rarissime en France.

Hautes-Alpes - Dix enfants du village rural de Puy Saint-Vincent (Hautes-Alpes) vont vivre leur rentrée des classes en maternelle ce lundi matin dans une classe un peu particulière. Celle-ci a été maintenue par la municipalité malgré la suppression de poste actée par l'Inspection académique du département en raison d'une baisse d'effectif. La commune, station de ski de moyenne montagne (1 800 m) a ainsi embauché sa propre enseignante pour un budget annuel de 30 000 euros. L'enseignante est en contrat à durée déterminé (CDD) d'un an. "Nous avons mis une annonce à Pôle emploi. Nous avons reçu cinquante dossiers", explique Jean-Louis Pichon, conseiller municipal et président de l'association "Les Trolles de Puy Saint-Vincent", qui rémunérera l'enseignante grâce à une subvention de la mairie.

Cette enseignante est Karine Chamberland, 38 ans, en provenance de Nice. La nouvelle institutrice indique qu'elle souhaitait "changer de département, avoir une vie plus près de la nature et être au grand air". Mme Chamberland s'est donc "mise en disponibilité" de l'Education nationale pour enseigner dans cette école privée hors contrat avec l'Etat. Son contrat à elle prévoit une rémunération équivalente à ce qu'elle touchait dans l'Education nationale, à savoir "près de 2000 euros par mois", selon elle. L'enseignante conservera aussi les mêmes méthodes de travail. "Je vais enseigner de la même manière que dans l'Education nationale, c'est une valeur sûre, sur le début, quitte après à innover un petit peu."
"C'est une expérience", explique le maire sans étiquette de la commune, Marcel Chaud. "Si les effectifs remontent de façon notable à la fin d'année, on va redemander à l'Inspection académique de renouveler le poste. L'important c'est de maintenir une continuité."

"La mairie voulait garder ses enfants, parce que si les enfants descendent dans la vallée, les parents vont suivre. On va perdre des habitants de la commune, et la commune petit à petit va mourir", rappelle le président de l'association, Jean-Louis Pichon. "La solution la plus viable et la moins coûteuse pour la commune était de créer une classe privée." Le conseil municipal ne voulant pas d'un rassemblement pédagogique intercommunal dans la vallée. "Quand il neige à 7h du matin, les conditions de circulation sont difficiles", justifie le maire, Marcel Chaud, pour s'opposer à un transport en car des enfants dans une autre commune.
D'après la municipalité, le projet de classe privée a fait l'unanimité au conseil municipal et parmi la population de 300 habitants à l'année, et 12 000 en saison hivernale. "S'il n'y avait pas cette classe spéciale, nous aurions été obligés de descendre avec les deux enfants en bas, aux Vigneaux ou à Vallouise. Maintenant, on peut rester ici, ce qui est mieux. Surtout pour le village. Cela peut faire venir d'autres familles", témoigne Vincent, habitant depuis trois ans le village et père de deux enfants qui sont scolarisés dans la classe de maternelle privée cette année.

La station de ski de Puy Saint-Vincent accueille en effet "près de 500 saisonniers" chaque hiver, selon la mairie, et certains ont des enfants. "C'est toujours plus intéressant et normal de faire des investissements pour les enfants plutôt que pour du goudron", ajoute Sébastien, autre habitant.

Pour cette année scolaire, l'école communale aura donc deux classes, une privée de maternelle et une publique de primaire. La première compte 10 enfants de 2 ans et demi à 5 ans, scolarisés de très petite section à grande section. La seconde, 17 enfants, de CP à CM2.

Photo Alpes 1. A l'école communale de Puy Saint-Vincent, Karine Chamberland,  l'enseignante, Jean-Louis Pichon, président des Trolles de Puy Saint-Vincent, et Marcel Chaud, le maire, sonnent la cloche de la rentrée des classes.