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Les retards, les surcoûts et des révélations qui entachent le projet ITER. Basé à Cadarache, à la frontière des Alpes de Haute-Provence, il est destiné à reproduire l’énergie du soleil en domestiquant la fusion nucléaire, ce sont 35 pays qui sont engagés dans la construction du plus grand tokamak jamais conçu. L’objectif ultime est de concevoir une source d’énergie à grande échelle, non émettrice de CO2. Désormais, ce sont 10 ans de retard pour ce chantier et un coût passé de 5 milliards à plus de 40 milliards.
« J’ai accumulé trop de témoignages que je ne veux plus garder que pour moi »
Un projet pharaonique également entaché par les révélations de Michel Claessens. L’ancien directeur de la communication du projet ITER a été entendu fin février auprès du Parlement Européen. Il dénonce une « gestion par la peur » et des « erreurs techniques » mettant en danger les travailleurs et l’environnement. Après cinq ans passés au cœur d’ITER, Michel Claessens ne veut plus garder le silence quant aux risques de ce projet.
Des erreurs techniques dans le « bioshield », les murs de protection du réacteur
Lanceur d’alerte auprès de la Commission européenne, qui finance ce projet pour près de la moitié, il a dénoncé des dérives inquiétantes à la fin février notamment les risques pour la protection de l’environnement et des travailleurs. L’Autorité de Sûreté Nucléaire a relevé des erreurs commises et a stoppé le montage du réacteur Tokamak, demandant des correctifs. « Les trois bâtiments nucléaires dont celui du réacteur sont entourés de murs en béton spécial pour arrêter les rayonnements et protéger les travailleurs et l’environnement », explique Michel Claessens. Mais à cause « d’erreurs de conception et de fabrication, la protection sera 30 % inférieure à ce qu’elle devrait être ». Si rien n’est fait, les employés tout comme l’environnement pourraient être soumis à des radiations, « la solution avancée par ITER n’a pour l’heure pas été acceptée par l’ASN », poursuit l’ancien responsable. L’ASN a également constaté, en juillet dernier, que le certificat d’une soudure non-conforme a été falsifié.
Un management « toxique », une gestion « par la peur »
Dans la foulée, le responsable de l’assemblage du réacteur a démissionné « parce qu’on lui imposait de faire de faux témoignages ». « Trois personnes ont également été licenciées pour avoir refusé d’installer, sans les tester, des pièces qui présentaient un risque mortel pour le personnel de maintenance ». L’organisation ITER aurait instauré une gestion par la peur, selon Michel Claessens. « Les témoignages expliquent le stress insupportable. On a peur d’être viré ». Une gestion par la peur qui s’est installée dans tout le projet, « il faut changer le management » alerte l’ancien porte-parole d’ITER. Il a été alerté il y a deux semaines du sicide, sur le site de Cadarache, de l’un des contractants du projet.
Déjà en mai 2021, un ingénieur italien de 38 ans au sein de l’agence Fusion 4 Energy à Barcelone, s’était donné la mort. Dans une lettre, il expliquait son suicide par un « effondrement professionnel » après avoir été traité « en bouc émissaire et humilié au premier degré ».