BTP : L’état en soutien au secteur du bâtiment et des travaux publics.

A l’occasion de la présentation en Conseil des ministres, les mesures de soutien mises en place par le Gouvernement pour accompagner la reprise d’activité du secteur du BTP ont été annoncées…et n’ont pas enchanté le secteur !

Le BTP est l’un des secteurs qui a vu son activité la plus fortement réduite : -88% début avril, soit la même baisse que l’hôtellerie-restauration alors même qu’il n’a pas fait l’objet d’une fermeture administrative à partir de mi-mars. Compte tenu de son poids dans l’économie et de son importance pour l’activité dans les territoires (le BTP représente 2 millions d’emplois et 11% du PIB), le Gouvernement a échafaudé un plan de reprise de l’activité dès le mois de mars, en lien avec les collectivités territoriales et les fédérations professionnelles.

Le BTP a ainsi pu bénéficier des dispositifs de soutien public : le fonds de solidarité (360 000 entreprises pour 510 millions d’euros), les prêts garantis par l’Etat (60 000 prêts pour 8,2 milliards d’euros) et l’activité partielle (demandes déposées pour 1,4 million de salariés et 1,3 milliard d’euros déjà versé au titre des mois de mars et avril). Le secteur a également fait l’objet d’initiatives spécifiques pour le soutien à la reprise avec la publication d’un guide professionnel de sécurité sanitaire sur les chantiers dès le 2 avril, des mesures spécifiques pour ne pas freiner l’autorisation ou la mise en œuvre des projets, la mobilisation des préfets pour inciter et accompagner la reprise rapide des chantiers…

Cette somme de mesures a abouti sur une forte accélération de la reprise d’activité depuis mi-mai :  seul 1% des chantiers de travaux publics et moins de 15% des chantiers du bâtiment sont encore à l’arrêt.

Pour soutenir la reprise complète de l’activité dans le secteur du BTP et en complément de tous les dispositifs de soutien déjà mis en œuvre, le Gouvernement a décidé de prendre de nouvelles mesures pour aider les entreprises du BTP à compenser les surcoûts et à accélérer la reprise.

                                              

Concernant la prise en compte des surcoûts :

  • Edouard Philippe a adressé le 9 juin aux maîtres d’ouvrage de l’Etat, pour leurs marchés de travaux, une instruction pour leur demander de négocier rapidement avec les entreprises du BTP une prise en charge d’une partie des surcoûts directs liés à l’arrêt des chantiers et aux mesures sanitaires.
  • Le Gouvernement a demandé aux préfets de promouvoir des chartes définissant une approche solidaire des surcoûts entre les entreprises du BTP, les maîtres d’ouvrage, dont les collectivités et bailleurs, et les maîtres d’œuvre. Pour aider les collectivités territoriales à financer une partie de ces surcoûts, les préfets peuvent utiliser leur pouvoir de dérogation pour mobiliser des dotations de l’Etat.
  • Dans le cadre du 3ème projet de loi de finances rectificative (PLFR3), les entreprises de moins de 50 salariés qui ont subi des pertes de chiffre d’affaires importantes pourront bénéficier de remises de charges sociales jusqu’à 50% sur leurs échéances des mois de mars à mai, sur simple demande à leur URSSAF. Toutes les entreprises pourront demander un plan d’apurement de leurs charges sociales reportées depuis mars sur une durée pouvant aller jusqu’à 36 mois.
  • Un comité de suivi est créé pour objectiver les surcoûts liés aux pertes de rendement sur les chantiers compte tenu de l’application des règles de sécurité sanitaire.
  • Le Gouvernement encourage les maîtres d’ouvrage publics à faire usage des dispositions de l’ordonnance n°2020319 du 25 mars 2020, qui permettent d’augmenter les avances aux entreprises titulaires de marchés publics au-delà de 60% sans obligation de garantie à première demande. Cette mesure est applicable pour tous les contrats conclus jusqu’à la fin de la période d’urgence sanitaire, augmentée de deux mois. Pour les marchés publics, comme privés, le gouvernement a par ailleurs reporté de plusieurs mois, par ordonnance, les pénalités applicables en cas de retard.

Concernant le soutien à la reprise :

  • 1 milliard d’euros va être ajouté par l’Etat en PLFR3 à la dotation de soutien à l’investissement local portant son enveloppe de 0,6 à 1,6 milliard d’euros. Elle vise à soutenir les investissements structurants des collectivités portant sur la santé, la transition écologique, notamment la rénovation thermique de bâtiments publics, et la rénovation du patrimoine.
  • Le dispositif de garantie de l’Etat à l’assurancecrédit est fortement renforcé en PLFR3 pour permettre aux entreprises de conserver leurs couvertures.
  • Dans le cadre du PLFR3, afin de soutenir la trésorerie des entreprises, les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés pourront demander dès 2020 le remboursement immédiat de leur stock de créances de report en arrière de leurs déficits ainsi que des créances qui viendraient à être constatées en 2020 du fait des pertes liées à cette crise sanitaire.
  • Pour maintenir les compétences au sein des entreprises et leur renouvellement, le Gouvernement a annoncé la création d’une aide au recrutement des apprentis, de 5 000 euros à 8 000 euros par contrat préparant à un diplôme jusqu’à la licence professionnelle. Cette aide sera versée aux entreprises de moins de 250 salariés sans condition et aux entreprises de plus 250 salariés à la condition qu’elles s’engagent à atteindre l’objectif, déjà fixé par la loi, de 5% d’alternants en 2021. Cela devrait représenter plus de 130 millions d’euros pour le secteur
  • Les travaux des copropriétés constituent une part importante de la commande privée adressée aux entreprises du bâtiment et sont décidés en assemblées générales. L’ordonnance n°2020595 du 20 mai 2020 permet de tenir ces assemblées générales sous forme de visioconférence ou par correspondance jusqu’au 31 janvier 2021, ce qui permet d’accélérer les décisions de travaux.

Au-delà de ces mesures d’urgence pour soutenir la reprise d’activité, le Gouvernement prépare également un plan de relance de l’économie qui sera présenté à la rentrée. Cette relance devra permettre de poursuivre et d’accélérer la transformation de l’économie française pour la rendre plus compétitive et plus décarbonée. Pour établir ce plan de relance, de larges concertations vont être conduites avec les fédérations professionnelles, les partenaires sociaux, les collectivités territoriales, les parlementaires. Le secteur du BTP sera directement concerné par ce plan de relance au titre de l’investissement notamment pour la rénovation thermique et au titre des simplifications de procédure pour accélérer les projets et le lancement des chantiers sans diminuer les exigences environnementales. Dans le plan de relance, des mesures sont envisagées qui soutiendront l’activité des entreprises du BTP, notamment pour participer à la transition écologique.

Le gouvernement a donc sorti les grands moyens qui visiblement n’ont pas atteint leur but. La Fédération Nationale des Travaux Publics a vite réagi en présentant ce projet « extrêmement déceptif et qui n’empêchera pas l’effondrement rapide du secteur ». Du côté de la Fédération Française du Bâtiment on est sur le même constat…ou presque : « Le gouvernement avait annoncé qu’un plan de soutien du BTP serait dévoilé à l’occasion du troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020. Force est de constater qu’il n’en est rien… ou presque ! » a déclaré la Fédération dans un communiqué.

Pour Jacques CHANUT, président de la FFB, « le bâtiment a été durement frappé par la crise sanitaire. Nous attendons toujours un plan de soutien significatif de la part du gouvernement : les annonces de ce matin en sont loin. À défaut, je le répète, c’est une partie des 2 millions d’emplois du secteur sur tout le territoire qui se trouveront menacés à court terme. »

Le gouvernement va devoir revoir sa copie.

 

TM