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Alpes du Sud : saison de ski en berne, les saisonniers trinquent

STATION / Les dégâts de début de saison provoquent des dommages collatéraux. Avec des disparités entre saisonniers et stations de ski


- Alpes du Sud -

Les vacances de Noël ont fait mal aux stations de sport d’hiver. Faible enneigement a rimé avec 30 % de fréquentation en moins et une diminution de 40 % du chiffre d’affaires. La neige est désormais de retour en altitude, au plus grand plaisir des vacanciers. Mais les dégâts de début de saison font des dommages collatéraux au sein du corps saisonnier.


Les primo-demandeurs, ou la double peine


Dans ce constat dramatique, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Tout d’abord, au sein même des saisonniers, certains s’en sortent mieux que d’autres, ce sont les salariés en reconduction automatique d’une saison à l’autre. Car, même si la station ne peut les embaucher, elle est tenue de leur verser le chômage partiel ou total.

Par contre, un autre régime en laisse aujourd’hui plus d’un sur le carreau, il s’agit des primo-demandeurs. Ceux qui ne sont pas en reconduction automatique. « Tous ceux qui sont primo-demandeurs n’ouvrent pas de droits quand ils ne sont pas embauchés pendant la saison d’hiver, alors que les autres en ouvrent même s’ils sont au chômage partiel », explique sur Alpes 1 Eric Becker, secrétaire fédéral FO chargé des remontées mécaniques dans les Alpes du Sud.

Dans les Hautes-Alpes, la CGT part à la rencontre des saisonniers et accumule les cas difficiles comme le constate Christian Schuller, « des saisonniers espagnols qui avaient une promesse d’embauche, et l’embauche ne s’est pas réalisée. Il y a souvent des clauses de restriction, comme un enneigement satisfaisant, le saisonnier est dans la difficulté. Un, de revenu immédiat. Deux, d’éventuels droits au chômage par la suite ».


Stations : le no man’s land de l’activité partielle


Il y a des disparités au sein des saisonniers, mais aussi au sein des stations. Face aux difficultés, l’État est en droit d’ouvrir le dispositif d’activité partielle, une allocation de plus de 7 euros de l’heure qui finance le chômage partiel. Dans les Hautes-Alpes, 165.000 heures d’activité ont été autorisées, soit plus de 1 million 100 mille euros, pour 1.349 salariés.

Problème : cette allocation n’est pas accordée aux régies directes, c’est-à-dire aux stations gérées par des communes ou intercommunalités. « Elles ne peuvent pas bénéficier d’une allocation spécifique, et se trouvent soit à payer les saisonniers s’ils sont sous contrat reconductible, mais les payer chez eux. Soit à ne pas embaucher les primo demandeurs », poursuit Eric Becker.

Les petites structures en régie directe se retrouvent aujourd’hui asphyxiées, comme par exemple dans le Queyras, « artificiellement, on maintient au maximum en ponctionnant sur les communes, qui font partie de cette régie, une taxe supplémentaire. Mais ça ne peut pas durer ».


Le Ministère du Travail se penche sur le dossier des saisonniers… sans réponse


Eric Becker fait aujourd’hui partie d’un groupe de travail ministériel. Il a rencontré la semaine dernière le conseiller de Myriam El Khomri. S’il redoute qu’aucune solution ne soit prise, il avance certaines propositions, notamment d’élargir cette allocation d’activité partielle à toutes les stations, « il faut que le Ministère comprenne que les saisonniers, embauchés par une régie directe donc publique, sont sous le régime privé. Aucun rapport avec des agents territoriaux. Vous avez donc des grosses structures qui perçoivent des sommes importantes, pendant que de toutes petites à l’agonie ne perçoivent rien ».

Aujourd’hui, l’État est en pleine réflexion sur l’allocation versée pour l’activité partielle. Il pourrait être envisagé de durcir les critères d'attribution car si elle est jusque-là accordée à titre exceptionnel, le gouvernement pointe le fait que le manque d’enneigement… n’est plus si inhabituel.