-Alpes du Sud-
Quelques lignes dans un «vade-mecum» de l’Association des maires de France (AMF), présidée par François Baroin (LR), publié cinq jours après les attaques de Paris mais préparé depuis des mois, ont suffi à réveiller le débat de l’an dernier sur une question que d’aucuns pensaient réglée depuis 1905 et la séparation des Eglises et de l’Etat.
Réaffirmer la loi qui proscrit tout signe ou emblème religieux dans les lieux publics
« L’AMF réaffirme la nécessité d’appliquer la règle définie à l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905, qui proscrit tout signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit », lit-on dans ce guide de « bonne conduite laïque ». Et l’AMF de souligner que « la présence de crèches de Noël dans l’enceinte des mairies n’est pas », de son point de vue, « compatible avec la laïcité ».
« Il ne s'agit que de recommandations », rappelle Jean-Michel Arnaud
Joint par Alpes 1, le président de l’AMF 05 et maire de Tallard, Jean-Michel Arnaud, précise que « ce vade-mecum n’est en aucun cas une obligation mais une recommandation aux maires par rapport à la législation ou la jurisprudence. L'AMF n'intervient pas sur le fond, n'impose rien mais formule des conseils afin que les maires puissent, au cas par cas, faire face à une instabilité juridique. » Ajoutant un brin agacé « il est impossible aujourd’hui de réfléchir et de travailler sans tomber dans la caricature, sans que certains pourfendeurs ne s’appliquent à faire ressortir les tensions sociales. » Notez que cette année sera installé sur Tallard un parcours de crèches.
Daniel Spagnou dénonce les propos tenus par François Baroin.
« Nous avons pour habitude d’exposer les crèches et les santons à la médiathèque et nous ne dérogerons pas à la règle cette année encore », déclare sur Alpes 1 le président de l’AMF 04 et maire (LR) de Sisteron, Daniel Spagnou, « la crèche fait partie de la culture et de la tradition provençale (…) je dénonce les propos tenus par François Baroin, car je ne partage pas son avis, je défends nos origines chrétiennes tout en respectant toutes les autres religions modérées », conclut le maire.
Marion Maréchal-Le Pen prend cela comme une « provocation ».
« C’est une provocation, la laïcité qui est la neutralité des pouvoirs publics à l’égard des religions, le refus des financements du culte n’est pas pour autant la disparition de l’ensemble de nos traditions populaires qui peuvent avoir une connotation religieuse en particulier catholique », estime la candidate FN à la région PACA.
Christian Estrosi « défend les traditions populaires »
« Je défends les traditions populaires de nos régions notamment lorsqu'il s'agit d'accueillir des crèches dans les espaces publics. Chaque année, la ville de Nice installe sur une place historique au cœur de la vieille ville, Lou Présépi, une crèche vivante qui attire toujours beaucoup de Niçois et de visiteurs », explique Christian Estrosi, candidat Les Républicains-UDI-Modem aux élections régionales en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Christophe Castaner veut apaiser le "vivre ensemble"
Pour le candidat PS-PRG-MRC, l'AMF aurait "mieux à faire que de s'occuper de cela en ce moment. Partout où cette tradition existait, il n'y a aucune raison de la remettre en cause". Le socialiste appelle à l'apaisement et au vivre ensemble, "pas d'hystérisation. La laïcité c'est tout faire pour garantir la liberté de croire et de ne pas croire".
Pour Jean-Marc Coppola, l'avis de l'AMF "est conforme à sa conception de la laïcité"
Pour la co-tête de liste de la Région Coopérative (EELV-FdG-PCF-Ensemble), la crèche n'a "rien à voir avec une tradition provençale (...) le choix de l'AMF va dans le sens de ma conception de la laïcité", ajoutant qu'a ce sujet, "la région c'est toujours refusée de voter des subventions à des associations cultuelles".
L’Observatoire de laïcité, temporise
L’Observatoire de la laïcité que préside l’ancien député et président du conseil départemental des Alpes de Haute-Provence, Jean-Louis Bianco, temporise en rappelant que la loi de 1905 a prévu des exceptions à la neutralité religieuse des bâtiments publics, notamment lors d’expositions.
« Si un particularisme local fait que la crèche peut prendre place dans une manifestation traditionnelle, folklorique et temporaire, alors elle pourra être installée », explique à l’AFP Nicolas Cadène, rapporteur général de cette instance qui dépend de Matignon. « Il faut examiner les situations au cas par cas, comme y invitait d’ailleurs Aristide Briand », rapporteur de la loi de 1905, ajoute-t-il, réaffirmant un principe: « L’Etat est impartial, il traite tous ses citoyens, qu’ils soient croyants ou non, de la même façon. »