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Hautes-Alpes : candidat aux législatives, qui est vraiment Jean-Marc Passeron ?

POLITIQUE / Retour sur le parcours et les raisons qui poussent celui qui se dit le plus capable de défendre le programme d’Emmanuel Macron, lors des législatives sur la 1ère circonscription des Hautes-Alpes.

 

- Hautes-Alpes -

 

Il y a chez certains Hommes une mécanique qui se répète, avec un profond besoin d’exister et de reconnaissance jamais assouvi. Des Hommes avides de tremplins, qu’ils soient sportifs, économiques, ou bien politiques. Un besoin parfois louable, synonyme de dépassement de soi et parfois flou sur les raisons de cet engagement.

Dans le cas particulier de Jean-Marc Passeron, candidat aux législatives sans étiquette sur la 1ère circonscription des Hautes-Alpes, il semblerait que ce besoin ne soit jamais assouvi, l’amenant à porter des initiatives de toutes sortes, s’arrangeant au passage avec la vérité et réécrivant sous son meilleur jour l’histoire passée et présente.

 

Du passé répond l’avenir ?

Ce n’est pas une première pour Jean-Marc Passeron que de flirter avec la politique, tout en étant dirigeant d’un média. Déjà en 2005, alors directeur de la société Alpes Développement, gérant les radios Alpes 1 et Là La Radio, il se lance dans la course aux élections cantonales partielles sur Gap Nord-Est, suite à la démission de l’UMPiste Denise Faure. Il sollicitera l’investiture UMP, mais sans jamais la recevoir. Le 24 mai de cette même année, Jean-Marc Passeron annonce son retrait « de ses fonctions éditoriales et rédactionnelles pendant toute la durée de la campagne » d’Alpes Développement. Mais dans les coulisses, d’anciens salariés se souviennent d’un directeur toujours présent physiquement, impliquant l’équipe dans sa campagne. « Je me souviens d’avoir vu quotidiennement des assistantes faire plus pour la campagne que pour la radio », explique la secrétaire de direction de l’époque, Laurence Thurin.  

2005 : Jean-Marc Passeron est élu sur le canton sous l’étiquette Divers Droite et quitte définitivement le groupe médiatique. Trois ans plus tard, il mène deux campagnes, celle des élections cantonales sur le même canton, où il est battu par le socialiste Claude Feutrier et les municipales de Gap. Roger Didier ne faisant pas appel à lui, Jean-Marc Passeron constitue sa propre liste. Avec seulement 11,79 % à l’issue du premier tour, contre 39,44 % pour Roger Didier et 28,81 % pour Guy Blanc, Jean-Marc Passeron refuse de se retirer malgré les demandes notamment de Pierre-Bernard Reymond. Il siégera alors dans l’opposition, avant de démissionner quatre ans plus tard pour créer une nouvelle radio. Il annonce alors à nos confrères du Dauphiné Libéré quitter la vie politique pour créer un nouveau média.

 

La majorité présidentielle et ses faux amis

Un faux départ de la vie politique pour un vrai retour dans la case législatives, après un lancement avorté en 2012 dans les Hautes-Alpes, déjà sur la 1ère circonscription. Un retour que certains considèrent comme de l’opportunisme.

Premier acte : s’enregistrer le vendredi 12 mai à 12h59 sur les listes d’adhérents « En Marche ! », à la veille de la présentation officielle des candidats investis par le mouvement aux élections législatives. Et alors qu’il laisse planer le doute d’une candidature au sein même de son média, il répond qu’il ne sera « candidat à rien » à nos confrères du Dauphiné Libéré, avant de s’inscrire quelques minutes avant la clôture en préfecture sur les listes des candidats aux législatives sur la 1ère circonscription des Hautes-Alpes.

Inscrit « sans étiquette », celui-ci décide d’agripper la locomotive Macron lancée à pleine vitesse en vue des législatives, s’annonçant comme « le candidat de la majorité présidentielle. » Un choix de la 26ème heure pour Jean-Marc Passeron, qui n’est pas investi par La République En Marche, mais qui fait feu de tout bois pour brouiller les pistes avec une rhétorique de campagne grossière s’appuyant sur les codes d’« En Marche ! ». Une technique qui n’a rien de novatrice, puisque déjà observée un peu partout en France par des candidats jouant la contrefaçon, afin de récolter à peu de frais les voix d’électeurs indifférents au débat politique.

 

Plus macroniste que les vrais Macronistes

Jean-Marc Passeron se lance donc dans cette campagne aux législatives aux côtés de la conseillère départementale Anne Truphème, se déclarant être « dans aucun parti » et représenter la « voix des Hautes-Alpes », se situant au centre droit et centre gauche. Mais avec une seule et même volonté : « donner toutes les chances de réussite au Président de la République au sein de la majorité présidentielle espérée ». Un soutien assumé au président Emmanuel Macron malgré l’absence de soutien de LREM envers ce candidat, puisque c’est la conseillère départementale de Gap Pascale Boyer qui a été investie. Tentative de récupération de la vague Macron ou véritable adhésion ? Quoiqu’il en soit, Jean-Marc Passeron n’hésite pas à jouer de l’ambiguïté dans sa campagne, que ce soit dans le vocabulaire « Marchons avec Passeron », ou sur les affiches de campagne « Passeron avec Macron ».

 

 

Difficile également de ne pas jouer au jeu des 7 différences entre la photo de campagne du candidat sans étiquette et celle de l’actuel président Emmanuel Macron, alors en campagne.

 

 

Un rapprochement volontaire également sur son tract de campagne où un certain Rémy de Romette aurait déclaré « C’est le Macron des Hautes-Alpes ». Rapprochement qui n’est pas du goût de la candidate LREM Pascale Boyer, qui a mis en demeure le candidat de cesser « toute diffusion de tout support de communication entretenant la confusion entre votre candidature et celle du candidat officiellement investi par La République En Marche, notamment ceux se prévalant d’une appartenance à la majorité présidentielle ». La candidate n’hésitant pas à « envisager toute voie de droit » à l’encontre de Jean-Marc Passeron, notamment « la saisine du juge judiciaire ou de l’élection afin de garantir la transparence, la sérénité et la sincérité de ce scrutin ».

Autre ambiguïté entretenue par Jean-Marc Passeron, celle avec le Parti des Hautes-Alpes, parti fondé par Georges Obninsky en 2014 en vue des élections départementales un an plus tard, avec une marque de fabrique, « l’indépendance de tous partis politiques ». Le candidat n’hésite pas, là aussi, à faire appel aux électeurs conquis par cette idée d’indépendance partisane à « faire le choix du parti des Hautes-Alpes » sur ses tracts et affiches de campagne. Un appel que n’ont que peu goûté les équipes du Parti des Hautes-Alpes, le mettant en demeure également de lever toute ambiguïté sur de présumés soutiens du parti à sa candidature.

Enfin, dernier fait d’arme dans l’ambiguïté politique, cette incursion de Jean-Marc Passeron lors de la visite de campagne de Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, à Chantal Eyméoud, candidate LR/UDI sur la 2nde circonscription des Hautes-Alpes. Le candidat, hors de sa circonscription, n’hésite pas à poser à côté de l’édile sur une photo, laissant supposer de son soutien. Selon une source proche présente ce jour là, « la réunion était publique. Il y a donc assisté comme chacun des participants, c’est-à-dire librement, mais n’a à aucun moment reçu un soutien quelconque de Jean-Claude Gaudin ».

 

 

Une ambiguïté politico-médiatique

L’expérience vécue au sein d’Alpes Développement serait-elle en train de se répéter au sein de sa télé locale ? En effet, parmi les conditions posées à sa candidature, Jean-Marc Passeron annonce avoir pris ses distances avec la rédaction qu’il dirige. « Il fallait que mon entreprise soit prête à tourner sans moi ». Un média dont il se serait écarté « il y a trois semaines », comme il l’avançait lors de sa conférence de presse le 31 mai, avant de transformer ce délai en « 15 jours » quelques minutes après. Soit entre le 8 et le 15 mai. Mais à y regarder de plus près, il n’en est finalement rien. Le 12 mai, Jean-Marc Passeron signe un article sur son adversaire politique au sein de cette circonscription, la sortante socialiste Karine Berger.

 

 

Deux jours auparavant, le 10 mai, lors de l’une des émissions de cette télévision locale dans laquelle on retrouve Jean-Marc Passeron derrière le micro, ses intervenants évoquent l’idée d’une candidature « de la société civile et de l’entreprise ». Une idée qualifiée de « saugrenue », lance alors Jean-Marc Passeron, un sourire malicieux peinant à être dissimulé, avant que l’un des acteurs autour de la table ne cache plus l’ambition de ce dernier : « Si on veut faire élire Jean-Marc Passeron, il faut faire battre la députée actuelle qui ne vaut rien, Karine Berger ».

Une ambiguïté qui ira jusqu’au bout au sein de son média, le candidat écrivant lui-même sa déclaration de candidature sur le site internet du média le 19 mai.

 

 

Un entrepreneur qui a réussi ?

C’est ce que met en avant le candidat pour avancer un développement économique dont il détiendrait les secrets. « Un succès unique en France » de son média selon Jean-Marc Passeron qui avance à qui veut bien l’entendre que 6 personnes sur 10 regardent sa télé. Contacté, Médiamétrie, institut mesurant l’audience des médias audiovisuels, ne semble pas du même avis. « Je confirme l’incohérence », explique le directeur du Pôle Local Guy Detrousselle. « Le chiffre de 54,7 % correspond au public global de la chaîne, soit l’ensemble des individus ayant eu un contact avec la chaîne et non pas à une audience », poursuit-il. Contact ? Il s’agit en fait d’une connaissance de la marque, sans pour autant la regarder…

Une réussite à quel prix ? Certains dénoncent du « chantage » de la part de l’ancien président du média, afin de signer des contrats publicitaires. C’est le cas de François Badjily, ancien directeur de l’office de tourisme de Serre-Chevalier, surpris de voir des reportages « à charge » sur la station haut-alpine. Notamment lors de la Coupe d’Europe de ski en janvier 2015, le responsable constate que l’angle choisi se tourne uniquement sur le manque supposé de clients à Serre-Chevalier. François Badjily explique alors avoir contacté Jean-Marc Passeron : « Il m’a alors expliqué que si j’ouvrais un budget publicitaire, les reportages se feraient sous un autre angle ».

Même version du côté d’Orcières-Merlette, le directeur de l’office de tourisme de l’époque, Fabrice Mielzarek, fait état d’une promesse de la part de Jean-Marc Passeron : « Donner un budget de 100.000 euros contre la présence d’un journaliste tout l’hiver 2013, ce à quoi je n’ai pas répondu favorablement de par le coût exorbitant, qui ne correspondait pas à notre budget ». Le responsable pointe alors un « harcèlement téléphonique et un chantage récurrents. Il me disait que je ne voulais pas l’aider à construire la télé des Hautes-Alpes ». Par la suite, l’ancien directeur parle d’une météo des neiges citant toutes les stations, « sauf Orcières-Merlette qui était appelée ‘la grande station du Champsaur’ ».

 

A.Cam