Bonjour Marc-André Bernier, après 8 ans passés en Ligue Magnus sous les couleurs de Briançon et Gap durant lesquels vous vous êtes imposé comme une figure emblématique du hockey haut-alpin, vous mettrez un terme à votre carrière sportive à l’issue de cette saison 2016-2017, la décision est-elle irrévocable ?
Oui c'est fait ! La décision a été prise en grande partie l'été dernier, durant l'intersaison. Un projet professionnel s'est présenté à moi, que je ne pouvais pas ignorer. Je ne vous cache pas que la décision a été dure à prendre, nous en avons discuté longuement avec ma femme et mes enfants, mais désormais c'est fait et on ne reviendra plus en arrière.
Vous venez de fêter vos 32 ans début février, pour un hockeyeur c'est encore jeune. C'est donc une opportunité de reconversion qui motive cette décision aujourd'hui ?
Oui, 32 ans c'est jeune mais malheureusement une carrière de hockeyeur n'est pas éternelle. Ce n'est pas une décision que je prends parce que j'ai envie d'arrêter le hockey, mais plutôt pour l'avenir. Vous savez, quand vous n'avez aucun diplôme parce que vous arrêtez les études pour vous consacrer au hockey à 19 ans, on ne laisse pas passer une opportunité comme celle qui se présente. Je m'étais dit qu'à partir de 30 ans je commencerais à réfléchir à l'après-hockey. Sportivement je vais peut-être le regretter, mais sur le long terme c'est la meilleure décision pour la famille Bernier.
Justement pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce projet ?
C'est un projet qui reste dans le hockey, avec mon frère (Jonathan Bernier, gardien des Ducks d'Anaheim en NHL). On veut investir dans une boîte d'assurance avec trois autres partenaires américains, afin de pouvoir proposer aux joueurs, comme mon frère qui évolue à haut niveau, des assurances à un prix compétitif.
Qu'est-ce que vous allez retenir de vos 8 ans passés dans les Hautes-Alpes avec les Diables Rouges puis les Rapaces ?
Il y en a beaucoup à retenir. Il n'y a eu que du bonheur, que des bons moments. J'ai adoré l'accueil que la France a réservé à notre famille et je tiens à vous en remercier. On a commencé avec la Coupe de France à Briançon, la première année de notre arrivée, ensuite la Coupe de la Ligue. On a enchaîné avec 5 titres. Ca a été des moments incroyables. Mon temps à Gap a été aussi bon, si ce n'est pas mieux. Ma femme se plaît beaucoup ici. On a créé deux petits Français à Briançon, donc nous allons garder un souvenir à jamais de la France avec eux.
C'est plutôt rare des enfants de Canadiens qui apprennent à patiner en France...
Exactement ! On retourne au Québec avec beaucoup de bagages français, dont l'accent pour mon plus vieux (rires). Non vraiment je n'aurai que des bonnes choses à dire à propos de la France à mon retour au Canada c'est certain.
Lorsque vous vous retournez sur votre carrière professionnelle depuis cette fameuse draft 2003 et votre sélection par les Canucks de Vancouver, jusqu'à votre blessure en 2008 en AHL, est-ce que vous vous dites que finalement, vous n'avez pas été malchanceux d'atterrir à Briançon juste après ?
Oui, c'est certain. Je m'étais blessé au genou en 2008 et nous avons eu la chance avec François-Pierre Guenette (Rouen) à l'époque, de venir ici avec Luciano et les Briançonnais. D'ailleurs je n'ai pas quitté la France depuis.
Luciano Basile aussi va quitter les Hautes-Alpes à la fin de la saison, c'est un drôle de clin d'oeil du destin au chemin que vous avez parcouru ensemble. Que diriez-vous de lui en tant que coach mais aussi en tant que personne ?
Ce n'est pas pour rien si je suis resté avec Luciano durant sept années sur les huit que j'ai passées ici. J'aime sa façon d'être avec les joueurs, d'être égal avec tout le monde. Avec lui, il y a un bon esprit d'équipe on est une vraie famille. Il sait tirer le meilleur de chacun d'entre nous et il sait également donner les congés quand il le faut. Son recrutement est irréprochable, je n'ai jamais eu d'inquiétudes à l'intersaison. C'est aussi pour ces raisons que je suis resté avec lui. Ça et l'ambiance ici, le soleil, quand tu y as goûté, c'est dur de partir.
Vous allez conserver beaucoup d'amis dans le département, cela veut-il dire qu'on vous recroisera dans les Hautes-Alpes ?
Oui, c'est certain. Il va falloir revenir d'ici quelques années. On va essayer de s'ennuyer un peu avant quand même et de revenir ensuite (rire). J'espère qu'ils viendront me voir eux aussi.
Votre destination précise, c'est où, si l'envie nous prend de passer vous faire coucou ?
À Laval, on a une maison à Terrebonne (Québec), ce n'est pas très loin de Montréal.
On aimerait vous revoir sur la glace avant votre départ, on rappelle que vous avez été blessé lors de la 41ème journée à Epinal. Pouvez-vous nous donner des nouvelles ?
J'ai passé une IRM mardi matin et j'ai apporté les résultats au docteur Cartier qui est un homme de confiance, avec lequel nous travaillons depuis que je suis arrivé à Briançon. Il m'a dit « deux semaines de repos ». Le diagnostic est toujours le même, nous ferons une nouvelle évaluation juste avant les play-offs, pour voir si je suis en condition pour débuter les phases finales avec l'équipe.
Un dernier mot pour les supporters qui ont soutenu le #41 au cours de ces huit dernières années ?
Je les remercie du plus profond de mon cœur. Mes garçons n'arrêtent pas de regarder des vidéos à la maison, des images de tous les bons moments que nous avons passés. Il y a des vidéos quand on a gagné la coupe à Briançon avec les supporters qui crient mon nom, ce n'est que du bonheur de revoir ça. L'autre jour, j'ai même croisé un monsieur dans la rue dont je n'ai pas remis le nom. Il est venu me voir et m'a dit des choses qui m'ont beaucoup touché. Lorsqu'il me voyait sur la glace, il avait juste envie d'être mon copain. J'ai été surpris, car c'est ce que j'ai voulu démontré tout au long de ma carrière, d'être une famille et un capitaine qui prend soin de chacun des joueurs. J'ai essayé de traiter tout le monde de la même façon et qu'un supporter vienne me voir en me disant que j'ai véhiculé ça aussi jusqu'à lui...ça m'a fait un grand bien. Si j'ai réussi à transmettre ce message alors, c'est une réussite pour moi et j'espère que les enfants, les miens compris, pourront apprendre de ça. Il y a tellement de gens qui vont rester gravés dans ma mémoire. Je voudrais aussi remercier les organisations des Rapaces de Gap et des Diables Rouges de Briançon et puis évidemment un gros merci à Luciano. Ce n'est pas fini, il faut venir nous supporter jusqu'au bout car il reste encore de bons moments à vivre à l'Alp'Arena !
Marc-André Bernier : 8 saisons et 5 trophées. 2009-2010 : remporte la Coupe de France dès sa première saison avec les Diables Rouges de Briançon. Termine meilleur buteurde la Ligue Magnus avec 27 filets en seulement 25 matchs. 2011-2012 : remporte la Coupe de la Ligue avec les Diables Rouges de Briançon. 2012-2013 : succède à Edo Terglav comme capitaine des Diables Rouges avec lesquels il remporte une 2e Coupe de France. 2013-2014 : remporte le titre de champion de France dans le match numéro 7 de la finale face aux Ducs d'Angers à René Froger. Marc-André Bernier, Dave Labrecque et Denny Kearney forment le trio le plus productif des play-offs avec 75 points (26 buts, 49 aides) en 15 matchs de séries. 2015-2016 : rejoint les Rapaces de Gap et remporte une 2e Coupe de la Ligue, la dernière de l'histoire. 2016-2017 : succède à Teddy Trabichet comme capitaine des Rapaces de Gap. Prend sa retraite sportive en fin de saison.