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Hautes-Alpes : il a fui Daesh, portrait d'un réfugié syrien

INTERNATIONAL / La Syrie souffre depuis 2011 de l'arrivée des mouvements djihadistes. Portrait de Tony, Syrien de 39 ans, qui vit depuis 5 mois dans les Hautes-Alpes, "le plus important, c'est sa famille, c'est de vivre..."

Photo Syrie / DR Reuters


- Hautes-Alpes -

C’est le dossier de la rédaction d’Alpes 1 : ce fut l’un des sujets de l’actualité il y a quelques semaines, le drame migratoire. Et l’arrivée dans les Alpes du Sud de familles fuyant le terrorisme. La rédaction a rencontré Tony, ce père de famille syrien est installé depuis cinq mois à Gap, avec femme et enfants. Après avoir réussi à fuir les exactions de l’État islamique, il a obtenu la semaine dernière son statut de réfugié. Rencontre exclusive pour Alpes 1.


"Le peuple syrien veut vivre, il ne quitte pas la Syrie pour chercher la fortune"


"Le peuple syrien cherche une vie normale", explique Tony au micro d'Alpes 1. Une vie normale, cette vie qui a été arrachée au peuple syrien. Arrachée également à Tony. Cet ancien attaché commercial dans la branche alimentaire, âgé de 39 ans et de confession chrétienne, a été contraint de fuir son pays. Aujourd'hui, avec les attentats de Paris, les projecteurs sont braqués sur la Syrie comme étant la source de terroristes. Un pays qui est avant tout terre de souffrances, et dont sa situation a basculé en 2011, année de la révolution civile. "Ce n'était pas une révolution, c'était un mouvement pour détruire la Syrie", poursuit Tony, un brin de nostalgie dans la voix. Nostalgie de ce qu'était son pays il y a encore quatre ans en arrière, "un territoire de paix, les gens pouvaient vivre une vie normale, aller où ils veulent".


Une présidence affaiblie, une brèche pour les djihadistes


Si le président Bachar Al Assad est vu à travers le prisme français comme un tyran sanguinaire, cet avis est loin d'être la réalité partagée par bon nombre de Syriens, selon Tony, "il a amélioré la situation économique du pays : création d'entreprises, de banques, d'emplois". Mais suite à la révolte populaire, les djihadistes, qui étaient déjà présents depuis 2004 dans un pays voisin, l'Irak, ont profité de cette brèche dans le pouvoir pour rejoindre la Syrie.

Depuis, la vie des habitants se déchire entre balles de kalachnikov et obus de mortier, exécutions sommaires et chasses à l'homme. "Les attentats de Paris, c'est la vie quotidienne pour les Syriens", pour Tony qui se remémore comment l'État islamique a atteint son voisin, avec qui il a grandi. Un voisin du même âge, parti chez le magasinier, et jamais revenu. Ou une de ses proches qui, revenant de l'école, a été amputée des deux jambes après que son bus ait été la cible d'un tir de mortier. "Le jour où j'ai emmené mon beau père à l’hôpital, une bombe a explosé. Une fillette de 7 ans est morte sur le coup, j'ai vu sa mère pleurer sur sa veste pleine de sang. Jamais je n'oublierai ce que j'ai vécu en Syrie".


Contre une intervention militaire en Syrie


Alors que certains défendent l'idée d'une intervention militaire au sol en Syrie, Tony explique que ce n'est pas la bonne solution, "cela ne ferait que détruire davantage le pays. Il faut couper les ressources de l'État islamique, c'est la seule solution". Un autre débat s'est installé, devenant politique au fil de l'approche des échéances régionales. Et certains représentants n'ont pas hésité à demander à ces Syriens qui ont quitté leur pays pourquoi ils n'avaient pas pris les armes pour défendre leur patrie, "la défendre de quoi ? de qui ? On ne comprend pas la situation en Syrie. Et il ne faut pas oublier que le plus important pour tout un chacun, c'est sa famille et de vivre...". Et en Syrie, on meurt encore...