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Les violences intrafamiliales toujours en hausse dans les Hautes-Alpes

Les violences intrafamiliales toujours en hausse dans les Hautes-Alpes

Déjà en janvier 2025, la procureure de la République des Hautes-Alpes attirait l'attention sur ce phénomène en hausse : +4,7% entre 2023 et 2024

Le rendez-vous était donné ce mardi, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, à l'hôpital de Gap. Dans le hall d'accueil du CHICAS, un stand présenté par le personnel hospitalier et le CIDFF (Centre d'information sur les droits des femmes et des familles) des Hautes-Alpes. Sur la table, posé pêle-mêle, un violentomètre, le numéro 3919 mis en avant, de la documentation sur ce phénomène social : les violences intrafamiliales. 

Le directeur du CHICAS, Nicolas Razoux, dénonce des situations de violences abominables envers les femmes en raison des modes de domination masculine : "l'hôpital est en première ligne en tant que lieu de rencontre de parcours de vie, en tant que lieu de soins : il est indispensable que les soignants soient capables de permettre la parole". 

Un lieu spécifique va ouvrir en janvier prochain au troisième étage du bâtiment de Gap : la maison des femmes, "le 12 janvier précisément". Ce lieu d'accueil unique de 100m² va ouvrir grâce aux volontés du CIDFF, des médecins, du personnel administratif, mais aussi, l'ARS, l'État, la police et la justice. Un lieu "d'écoute, de prise en charge, d'accompagnement" selon Nicolas Razoux, et le département en a bien besoin.  

Des chiffres en hausse en 2025 

Car les chiffres ne sont pas bons. Déjà en janvier 2025, la procureure de la République des Hautes-Alpes attirait l'attention sur ce phénomène en hausse : +4,7% entre 2023 et 2024. Et la hausse n'a pour le moment pas été endiguée à en croire les premiers chiffres révélés par Marion Lozac'hmeur. 

"Les chiffres devront être consolidés en janvier, mais on a des chiffres liés à la violence, dont les violences intrafamiliales, qui sont en hausse de 4,8% par rapport à l'an dernier. On est sur un plateau haut et cela ne régresse pas" M. Lozac'hmeur 

Les explications de cette augmentation résideraient selon elle dans la mobilisation générale des services de l'État qui vont "davantage vers les victimes". "Des femmes qui ne déposaient pas plaintes ou des plaintes qui n'étaient pas traitées avec la diligence nécessaire le sont aujourd'hui." explique la magistrate du Parquet de Gap.

La justice est confrontée quotidiennement aux violences faites aux femmes rappelle la procureure : les Hautes-Alpes ne font pas exception cette semaine avec deux dossiers au tribunal ce lundi, un autre ce mardi et un dernier ce mercredi".

 

 

L’actualité récente est aussi reprise par le préfet. Philippe Bailbé rappelle que 5 féminicides, soit le meurtre d’une femme par son conjoint ou son ex conjoint, ont eu lieu la semaine dernière. L’un d’eux a concerné Zaïa, haut-alpine de 27 ans, en Isère. Un phénomène selon le préfet “qui ne veut pas en réalité diminuer”, mais “qui est mieux connu et mieux sanctionné. En France, 107 femmes ont été tuées l’an passé par leur conjoint ou ex-conjoint selon les chiffres du ministère de l’Intérieur. Cette année, selon les organisations de lutte contre les violences faites aux femmes, le chiffre atteint déjà 152 au 23 novembre selon le décompte de l'organisation Nous Toutes.

Un État en échec face au phénomène ?

Après la vague Metoo, les violences faites aux femmes sont devenues en 2017, la "grande cause du quinquennat" d'Emmanuel Macron. Des avancées ont été faites sur le sujet avec par exemple le renforcement de la présence des intervenants sociaux dans les services de police et de gendarmerie pour les femmes qui franchiraient la porte d'un commissariat. Un Grenelle des violences conjugales a mobilisé également les différents acteurs de la lutte contre ce phénomène social avec le 25 novembre 2019, 46 mesures proposées sous trois axes : prévenir, protéger et punir.

Les moyens ont notamment été renforcés pour le numéro national d’écoute téléphonique, le 3919 (5,3 millions d'euros en 2024). Un rapport sénatorial du 2 juillet 2025 montre que le programme "égalité entre les femmes et les hommes" a vu son budget tripler entre 2020 et 2024, et même quadrupler entre 2020 et 2025. Ce même rapport rappelle toutefois que la fondation des femmes estime de son côté les moyens insuffisants. Pour le budget 2023, selon le rapport sénatorial, les dépenses de l'État étaient de 171,6 millions d'euros quand les "besoins identifiés par la Fondation des femmes pour les seules violences conjugales apparaissent comme largement supérieurs aux moyens avancés par l'État". Il faudrait selon la fondation "entre 2,2 milliards et 3,1 milliards d'euros par an".  

Alors, avec l’augmentation des féminicides selon les premiers chiffres, l’État est-il en échec dans la lutte contre les violences faites aux femmes malgré une augmentation des budgets ? 

“Pour répondre à la question, je dirais que c'est la société qui est en échec.” P. Bailbé. 

Pour le préfet des Hautes-Alpes, pour représentant de l'État et du gouvernement sur le territoire, la responsabilité est collective : “ce sujet est complexe d’agressivité usuelle dans des relations quotidiennes dans un foyer.

Ce sujet n’est pas qu’un sujet de sanction, c’est un sujet d’éducation, un sujet collectif et sociétal.” P. Bailbé 

 

 

Le préfet pointe donc une responsabilité collective et sociétale et il salue la mise en action prochaine de la maison des femmes à Gap, un “espace pluridisciplinaire permettant à chaque femme victime d’être accueillie sereinement par des professionnels pour mieux lutter contre ce phénomène. Vivement le 12 janvier. 

N. Dalbera