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Alpes de Haute-Provence : Les habitants du Vernet au cœur d'une nouvelle tragédie

ATTENTATS PARIS / Deux frères, comme près de 1.400 Alpins du Sud, ont vécu une scène de guerre, lors de ce qui devait être une soirée de fête.


- Alpes de Haute-Provence -


Une centaine d'habitants du Vernet est partie pour Paris dès 4h du matin ce vendredi, pour aller voir le match amical France-Allemagne. L'idée est venue de la Lufthansa, qui avait décidé d'inviter près de 1.400 personnes des Alpes du Sud, pour les remercier du service rendu lors du crash de l’A320. Ce devait donc être une belle journée parisienne pour ces habitants.

Elle a été belle jusqu'à ce moment précis, la 17ème minute de la première période : une détonation envahie l'espace sonore de l'enceinte du Stade de France. « Cette première déflagration a fait trembler les blocs de béton », raconte Bernard et Christian Mollet, deux frères habitant Le Vernet. Ils sont arrivés un peu en retard pour le début du match et ont pris place à la tribune C. Cinq minutes après s'être installés, ils entendent cette détonation. « On a a tout de suite su que ce n'était pas un pétard du 14 juillet. C’était plus grave que ça. La déflagration a fait vibrer le sol sous nos pieds. On a senti que ce n'était pas un jeu, que c'était du sérieux », explique Bernard. « J’ai entendu un grand boum et les murs trembler autour de moi. Mais, je voyais que cela n'inquiétez personne. Certaines m'ont dit que cela devait être de gros pétards. On a l'habitude les soirs de match. Je me suis calmé, mais tout de suite, j'ai vu que c'était sérieux », évoque sous le choc Christian.


« Si on tombait, on se faisait piétiner. »


À la fin du match, le speaker annonce qu'il faut sortir par les quatre portes situées à l'ouest. Les autres sont inaccessibles en raison d’incidents aux abords du Stade. Quand certains décident de rester sur la pelouse, d'autres veulent rejoindre la sortie. Ce fut le cas des deux frères.

« Un mouvement de panique de fou ! », se souvient Bernard. « J’ai vu une vague humaine déferler vers moi et a mis à terre pas mal de personnes, qui ont été piétinées. Nous, nous avons eu un coup de bol de fou. J'ai vu un angle de béton, je me suis caché dans cet angle. J'ai juste eu le temps d'attraper ma femme et la copine de mon fils. On a eu un abri. On a eu vraiment peur et puis, avec les cris des parents qui cherchaient leurs petits, c'était affreux. »




« On était dans la guerre. Des gens allongés par terre. Des policiers cagoulés en armes, criant rentrez chez vous, rentrez chez vous. J'ai vu un ami du village qui serrait ses enfants contre lui de peur, pour les mettre à l'abri de la foule qui marchait sur tout le monde. Si on tombait, on se faisait piétiner. Je suis rentré à l'hôtel en rasant les murs et en m'abritant de temps en temps derrière les arbres », raconte Christian.

Bernard a su regagner la seule sortie. Son objectif était de rejoindre son hôtel, à 500 mètres du Stade. « On ne savait plus où était le Nord, ni le Sud. On était affolé. On ne savait plus où on était. » Leur peur, croiser des terroristes. « On était en temps de guerre. On avançait. On regardait devant nous. On se cachait. Et puis, nous sommes arrivés à l'hôtel vers 1h du matin et là, on vu des gardes et tous les rideaux étaient fermés. Là, on savait que c'était grave. »


« Je suis soulagé d'avoir laissé derrière moi une ville qui m'a fait peur. »


Dans le wagon bar du train, qui ramène nos deux frères sur leur terre natale, Christian et Bernard se sentent soulagés et aussi interrogatifs sur l'avenir. « Je suis content de laisser Paris dans le dos. Je descends vers la Provence. Je descends vers le soleil. Je suis content d'avoir laissé cette ville qui m'a fait tellement peur », dit Bernard, avant de soupirer, les larmes aux yeux : « Je me languie de retrouver mon petit village. »

Pour Christian, « ça va rajouter encore à ce que nous avons déjà vécu. Je pense à la Lufthansa qui doit s'en vouloir. Elle, qui a fait tant pour nous soulager et aplanir les choses. On subit, mais il faut rester debout, autrement c'est eux qui ont gagné. »