Alpes de Haute-Provence - Le doute est désormais écarté, si les doutes subsistaient. Le Bureau d’Enquête et d’Analyse le confirme : Andreas Lubitz a « intentionnellement réglé les consignes du pilote automatique pour commander la descente de l’avion jusqu’à la collision avec le relief ». La responsabilité du copilote allemand de 27 ans est donc aujourd’hui clairement établie. Selon le BEA, Andreas Lubitz aurait déjà testé la descente des Airbus dans le vol qui a précédé celui du crash.
Andreas Lubitz a-t-il prémédité son acte ?
Y avait-il préméditation d’Andreas Lubitz ? Les éléments d’enquête
fournis par le BEA semblent corroborer cette hypothèse. Le 24 mars au matin, le
copilote effectue le vol de Düsseldorf vers Barcelone. L’appareil décolle à
6h01. Et le scénario qui suit rappelle l’autre, plus dramatique, qui se
produira quatre heures plus tard. Alors que l’avion est en croisière, le pilote
quitte le poste de pilotage. Quelques secondes après, Andreas Lubitz change l’altitude
et la diminue à 100 pieds, puis l’augmente jusqu’à la valeur maximale de 49.000
pieds, puis la change à plusieurs reprises à 100 pieds jusqu’à se stabiliser à
25.000 pieds. Quatre minutes après le départ du pilote, le signal sonore de
demande d’accès au poste de pilotage est enregistré. Andreas Lubitz déverrouillera
cette fois-ci l’accès.
Le parcours médical d’Andreas Lubitz
Le parcours professionnel et médical du copilote est passé au crible par le BEA. Andreas Lubitz a commencé sa formation de pilote de ligne chez Lufthansa en 2008. Mais à la fin de cette année, il l’interrompt pour des raisons médicales. Quelques mois auparavant, son certificat médical n’est pas prorogé par Lufthansa en raison d’une dépression et de la prise de médicaments. Finalement, il reprendra sa formation un an plus tard, puis entre en septembre 2013 chez Germanwings, où il passe et obtient sa qualification pour les Airbus de type A320. 26 juin 2014 : Andreas Lubitz réussit son contrôle en ligne et est nommé copilote.
Comment s’est déroulé le vol 4U9525 ?
Le Bureau d’Enquête
et d’Analyse détaille, dans son rapport, le déroulement exact du vol 4U9525, aucun
doute ne demeure donc sur la responsabilité et la volonté du jeune copilote de
crasher l’avion. Le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses a repris tous les éléments
des enregistreurs de vol et d’enregistrements de radiocommunications.
9h27 : l’avion est à son altitude de croisière, 38.000 pieds soit presque 11.600 mètres d’altitude. Le commandant de bord demande au contrôle aérien de Marseille de faire route directe, ce sera la dernière communication de l’équipage avec l’extérieur, puis quitte le poste de pilotage à 9h30. Il demande à Andreas Lubitz de prendre en charge les communications radiophoniques.
9h31 :
Andreas Lubitz change l’altitude du pilote automatique, et le fait passer de
38.000 pieds à 100 pieds. L’avion
commence à descendre et les régimes des deux moteurs diminuent. Alors que
la vitesse de l’avion est de 505 km/h, le copilote change la consigne et l’augmente
à 570 km/h. L’Airbus entame alors une descente de plus de 1.000 mètres par
minute.
9h34 :
Andreas Lubitz accélère encore la vitesse de l’appareil jusqu’à 598 km/h. Au
même moment, le pilote, de l’autre côté du cockpit, tape le code d’accès au
poste de pilotage. Un signal sonore d’une seconde émis par le buzzer retentit
pour demander l’autorisation d’ouverture. Pas de réponse. Pourtant, dans les
Airbus A 320, des écrans de surveillance provenant de trois caméras sont
disposés dans le cockpit. Aucun doute qu’Andreas Lubitz ait bien vu qu’il s’agissait
du pilote.
9 h 39 : le pilote tente de défoncer la porte blindée du cockpit, et hurle à Andreas Lubitz de lui ouvrir.
9h40 : le copilote agit sur le mini-manche pour accélérer la descente.
9 h 40 min 41 : la première alarme sonore retentit, il s’agit de l’avertisseur de proximité du sol. Cette alarme sera active jusqu’à la fin du vol.
9 h 41 min : une alarme de type Master Warning se déclenche et restera active jusqu’à la fin du vol.
A 9 h 41 min 06, l’enregistrement du CVR s’arrête au moment de la collision avec le relief.
7ème crash dû à une manœuvre délibérée depuis 1980
1982 : un pilote, souffrant de schizophrénie, fait s’abimer en mer l’appareil de la Japan Airlines. 24 morts.
1994 : le commandant de bord du Royal Air Maroc désengage le pilote automatique, l’aéronef s’écrase sur les terres marocaines. 44 morts.
1997 : l’avion de la Silk Air se crash en Indonésie, l’enquête de sécurité n’a pas permis de mettre en évidence de problème technique permettant d’expliquer l’accident. 104 personnes décèdent.
1999 : le pilote, seul à bord, dirige l’avion d’Air Botswana vers le sol sur l’aéroport de Gaborone.
1999 : l’avion de l’Egypt Air est en croisière quand le commandant de bord et le copilote en fonction quittent le poste de pilotage. Le copilote suppléant déconnecte le pilote automatique, des actions à piquer sont engagées, les moteurs sont coupés. 217 morts.
2013 : 33 personnes décèdent dans le crash en Namibie. Le copilote quitte le poste de pilotage pour se rendre aux toilettes, laissant le commandant de bord seul. A trois reprises, différentes altitudes sont sélectionnées pour commander une descente jusqu’au sol au pilote automatique. Les enregistreurs de vol mettent en évidence des sonneries ainsi que des bruits de coups répétés et des appels correspondant à des tentatives de pénétrer dans le cockpit. Un scénario qui se rapproche de celui de la Germanwings.
L’enquête du BEA se poursuit
L’enquête du BEA se poursuit autour de deux axes : l’aspect médical pour comprendre comment et pourquoi des pilotes peuvent se retrouver dans un poste de pilotage avec l’intention d’entraîner la perte de l’avion avec ses occupants, malgré les critères médicaux mis en place pour le personnel navigant et les politiques de recrutement. Des questions autour de la sûreté en poste de pilotage seront aussi posées, notamment face aux exigences de sûreté qui ont fait suiteaux attentats du 11 septembre. Depuis, le système de verrouillage des portes de cockpits a été durci.